A propos du SRDAM, Schéma régional de développement de l’aquaculture marine en Poitou-Charentes
La
DIRMSA, Direction interrégionale de la Mer Sud-Atlantique (Ministère de
l’Ecologie, du Développement durable et de l’énergie) a élaboré depuis l’été
2011 2 schémas de développement de l’aquaculture marine pour les régions
Aquitaine et Poitou-Charentes. Nous en sommes pour le Poitou-Charentes à la
phase finale dite « consultation du grand public » par mise en ligne
internet sur le site de la DIRMSA.
Le SRDAM est un document essentiellement cartographique recensant les sites aquacoles (conchyliculture et pisciculture) existants et potentiels dans chacune des 2 régions, essentiellement entre 10 et 20 mètres de profondeur. Les deux pages de préambule et d’introduction présentent les objectifs d’un document qui se présente comme neutre : « ce schéma a pour objectif de recenser les sites, éventuellement de les décrire et en aucun cas de tirer quelconques conclusions, préconisations et recommandations ». S’agissant de l’espace maritime des Pertuis breton et charentais le résultat cartographique est saisissant (carte des sites potentiels de production conchylicole, p. 20 ).
Le SRDAM est un document essentiellement cartographique recensant les sites aquacoles (conchyliculture et pisciculture) existants et potentiels dans chacune des 2 régions, essentiellement entre 10 et 20 mètres de profondeur. Les deux pages de préambule et d’introduction présentent les objectifs d’un document qui se présente comme neutre : « ce schéma a pour objectif de recenser les sites, éventuellement de les décrire et en aucun cas de tirer quelconques conclusions, préconisations et recommandations ». S’agissant de l’espace maritime des Pertuis breton et charentais le résultat cartographique est saisissant (carte des sites potentiels de production conchylicole, p. 20 ).
Les
4 sites potentiels retenus (A, B, C et D) couvrent une superficie considérable
et l’on peut à bon droit s’interroger sur la valeur stratégique d’un telle
hypothèse de travail qui, si elle était suivie dans les faits, supprimerait
d’emblée la libre circulation maritime dans un espace dont c’est la vocation
première et exclurait les autres activités marines et littorales.
En
réalité, la neutralité n’est que de façade. Dans le droit fil des préconisations (et des financements) de
la commission européenne, le schéma se place résolument dans la logique du
« Grenelle de la mer » de 2009: « confier aux aquaculteurs les espaces nécessaires et prévenir les
conflits d’usages et d’objectifs en développant une approche de planification
stratégique ».
Les termes de la lettre adressée le 27 novembre par la DIRMSA aux membres de la commission permanente du Conseil maritime de la façade Sud Atlantique en vue de l’examen des SDRAM sont plus clairs encore:
Les termes de la lettre adressée le 27 novembre par la DIRMSA aux membres de la commission permanente du Conseil maritime de la façade Sud Atlantique en vue de l’examen des SDRAM sont plus clairs encore:
Au-delà
du jargon technocratique il s’agit bien
d’imposer un zonage de la mer excessivement favorable à un seul secteur
d’activité, l’aquaculture.
Plusieurs
observations s’imposent :
- sur la concertation : les ostréiculteurs et les
mytiliculteurs ont été les interlocuteurs privilégiés des services de l’Etat,
l’IFREMER fournissant les documents techniques concernant la qualité des eaux
et la nature des fonds. Les associations représentant les activités nautiques,
la pêche, ont été très peu voire pas du tout associées à la préparation du
document. Quant au « grand public » c’est une caricature de
consultation qui lui est offerte avec une annonce légale dans le journal
Sud-Ouest et une seule possibilité d’expression sur le site internet de la DIRMSA.
S’agissant de la consultation des collectivités locales on s’interroge sur ses
modalités et sur la manière dont les élus concernés ont répercuté les
informations auprès des collectivités de base, les communes. En ce qui concerne
les citoyens nous avons la réponse : aucune information n’a été faite. Tout
ceci est cohérent avec les limitations qui sont apportées à l’expression des
associations environnementales depuis quelques années.
- sur la méthode : les auteurs indiquent que les emprises ont
été surestimées et qu’il a été par ailleurs « impossible de prendre en compte les aspects relatifs aux activités et
aux usages locaux » pour des
raisons techniques (échelle du document, informations locales non
géoréférencées). Les conflits d’usages potentiels sont ainsi occultés par
l’échelle adoptée et par l’absence de données socio-économiques précises sur
les cartes et dans le document. La carte ne montre que l’activité valorisée,
l’aquaculture, ainsi que les espaces protégés. Les autres activités et usages,
non localisés, n’ont quasiment plus d’existence concrète. C’est bien là le
pouvoir des cartes et l’objectif d’une planification stratégique sectorielle qui
rappelle la période glorieuse des années 1960 lorsqu’il fallait
« lisser » l’espace pour le rendre fonctionnel, installer les
autoroutes, les aéroports, les grands ensembles et les usines de montage. Il
fallait le libérer de ses « aspérités » gênantes : les
habitants, les usagers et leurs pratiques. On est très loin des efforts de
gestion intégrée et de la volonté d’arbitrage qui avaient présidé à
l’élaboration du Schéma de Mise en Valeur de la Mer dans les années 1990 et
abouti à des analyses nuancées sur les divers usages de la mer et leur
compatibilité.
- sur la portée juridique : l’ambiguïté règne. Néanmoins, la
volonté de « dépasser les blocages
procéduraux » apparaît bien dans une série de dispositions qui font de
ce schéma approuvé par le préfet un document de référence pour toute demande
d’autorisation d’exploitation des cultures marines, tant pour les services de
l’Etat chargés d’instruire ces demandes que pour les demandeurs. Même s’il est
précisé que toute demande doit respecter les exigences réglementaires inscrites
dans la loi, ce document confère d’emblée une forme de légitimité à tout
investissement qui s’inscrit dans les périmètres retenus. Sous couvert d’une
pseudo-neutralité technique, il contribue à renforcer les conditions légales
qui rendent difficile voire impossible toute contestation des grands projets
d’exploitation du domaine public maritime.
- sur la référence au
développement durable : celle-ci est abusive car le modèle productif
qui sous-tend la conchyliculture en eau profonde (celle qu’il s’agit de
développer dans ce schéma) est fondé sur une logique d’expansion territoriale
impliquant l’abandon des sites les moins productifs ainsi que sur les gains de
productivité rendus possibles par l’élevage des huîtres et des moules
triploïdes et la productions massive de naissains d’écloserie. Produire plus et
plus vite pour compenser les mortalités, raccourcir les durées d’élevage grâce
à des coquillages manipulés chromosiquement. Sans étiquetage et sans
information des consommateurs. Il s’agit bien d’un système agro-industriel, non
durable, alors que des solutions alternatives existent, plus modestes, plus
respectueuses de l’environnement naturel et humain, moins sélectives
financièrement.
Finalement,
Cette « planification
stratégique » résout les problèmes
liés à la concurrence pour l’accès et l’utilisation de l’espace (selon les
termes du schéma) en affirmant la primauté d’un seul secteur d’activité sur
tous les autres au nom d’une rationalité technico-économique contestable. Elle
légitime le zonage et l’appropriation privée de fait du domaine public
maritime sans aucune considération sur
l’intérêt général, les usages multiples de la mer, le bien commun que celle-ci
représente.
Nous nous opposons donc à la validation de ce document par les autorités
préfectorales.
Affaire suivie par Olivier Lallemand et Tiphaine Cariou
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Tél. : 05 56 00 83 30 - 05 56 00 83 57 / Fax :
05 56 00 83 47
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Courriel : olivier.lallemand@developpement-durable.gouv.fr
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tiphaine.cariou@developpement-durable.gouv.fr
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